vendredi 13 mars 2009

L'EXPO DAVID LA CHAPELLE A LA MONNAIE DE PARIS VUE PAR PARISART.COM !


David LaChapelle
06 févr. - 31 mai 2009
Paris. Monnaie de Paris
Les œuvres de David LaChapelle sont construites selon des angles les plus variés, des teintes saturées, en accumulant des strates de signes et de signifiants qui rendent ses images polysémiques, énigmatiques et, en fin de compte, anachroniques.
C’est donc à la Monnaie de Paris, lieu étatique s’il en est, mais en même temps commercial (qui achète et vend des monnaies métalliques courantes, des pièces de collection, des médailles et décorations, des fontes d’art, des bijoux et autres Rolex), dont une partie des espaces a été privatisée, concédée, louée, le temps que nous revienne la belle saison, à des organisations. événementiels ou à des «producteurs» artistiques (Lin’Art, Alphaomega Art, Fred Torres Collaborations), que se tient la première rétrospective française du célèbre photographe et réalisateur américain — on a réuni pour cette occasion en or environ 200 œuvres. Rétrospective qui est, d’ores et déjà, un incontestable succès en terme d’audience.
Après des études d’art en Caroline du nord, une vie new-yorkaise où il a travaillé comme serveur au Studio 54, boîte disco qui accueillait la bohème, l’underground, le monde de l’art, de la mode et du show-business, les starlettes et les stars, les marginaux et la Jet Set, de la fin des années 70 jusqu’au début des années 80, David LaChapelle rencontra Andy Warhol qui publia en 1982 ses premiers nus photographiques dans son magazine Interview. Un autre date-clé de l’artiste semble avoir été le soutien inconditionnel de l’éditeur encyclopédiste et mécène, au sens florentin du terme, Benedikt Taschen qui, à partir de 1996, décida de publier tout son œuvre.
La rétrospective parisienne donne une idée précise de l’évolution formelle et thématique de David LaChapelle. On peut y repérer une première période à base d’illustrations destinées à des magazines de mode (Interview, Details, Vanity Fair, The Face, Vogue, Rolling Stone) qui sont, il faut bien l’avouer, passe-partout — ni vraiment dérangeantes ni audacieuses du point de vue artistique.
Suit une série de portraits, disons «people», relativement pervers, avec une recherche de mise en scène sortant de l’ordinaire. On dit «relativement», parce que, contrairement à d’autres, à commencer par Andy Warhol, Kenneth Anger, Robert Mapplethorpe, Helmut Newton, Pierre et Gilles, etc., il nous semble que David LaChapelle n’est jamais scabreux, morbide, sordide, ambigu. Il va droit au but, exprime ce qu’il a en tête clairement, simplement, avec des lumières crues (naturelles ou artificielles), les angles les plus variés, des teintes saturées, en accumulant des strates de signes et de signifiants qui rendent ses images polysémiques, énigmatiques et, en fin de compte, anachroniques.
Témoin de son temps, des excès en tous genres de la fine fleur et de la faune new-yorkaises, attiré par le dandysme des jeunes Noirs ou Latinos du milieu du hip-hop avec lesquels il a toujours été en empathie (voir le rappeur Kanye West transfiguré en Christ portant une couronne d’épines, et les inconnus de toutes origines sociales ou ethniques, de toutes tendance sexuelles), il lègue une empreinte des années 90 dont lui sauront gré, plus tard, les sociologues, les historiens et les ethnologues, ainsi qu’une trace dont la valeur est encore inestimable du passage de la photographie analogique à l’art numérique.
Les V.I.P. (Pamela Anderson, Paris Hilton, Britney Spears, Marilyn Manson, Hillary Clinton, Leonardo DiCaprio, Naomi Campbell, David Bowie, Tupac Shakur, Elton John, Jeff Koons, Tori Amos, Jude Law, Gael Garcia Bernal, Alicia Keys, Bjork, Cher, Elizabeth Taylor, Uma Thurman, Muhammad Ali, David Beckham, Madonna, Eminem, sans oublier sa muse, Amanda Lepore) sont ses icônes avant de devenir les figures imposées des tabloïds du monde entier.
L’importance du Surréalisme dans son travail associatif, dans sa recherche d’insolite (ses paysages sont tout aussi fantastiques, oniriques ou «métaphysiques» que ceux d’un Giorgio de Chirico auquel la Ville de Paris rend hommage en ce moment) et dans ses mises en scène est tel qu’il est à l’origine de trouvailles (trouvailles ou retrouvailles, la redite ou la citation étant la règle du jeu avec les «clichés») comme le prouve la magnifique salle consacrée aux Eveils, avec ces dormeurs debout, ces modèles, qui n’ont rien de tops, en lévitation, le regard hagard, surpris dans le sommeil profond par l’appareil indiscret (mais non voyeuriste) du photographe.
La relecture d’épisodes de l’Ancien et du Nouveau Testaments a inspiré les scénographies qui ont succédé, lesquelles sont entrecoupées, naturellement, par des travaux alimentaires. Le récit du Déluge de la Genèse pastiche Michel-Ange, le photographe rapprochant, consciemment ou non, son nom de celui de la Sixtine. Ce thème est par ailleurs associé à celui du cyclone Katrina — voir les photos de mannequins sur leur 31 posant devant des cabanes en bois saccagées qui font songer à l’attitude impassible de Buster Keaton devant la tempête de Steamboat Bill Jr, 1928.
Par Nicolas Villodre

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