mardi 2 décembre 2008

HURRICANE : GRACE JONES REVIENT !




Grace Jones revient ! On y croit à peine et pourtant on se demande comment elle a pu rester aussi longtemps absente tout en donnant l'impression de ne jamais l'avoir réellement été. A la fois totalement actuelle et virtuellement intemporelle, pas de doute, la diva fut, est et restera, un vivant symbole du paradoxe artistique. Comme toute sa carrière. Entre objet d'art contemporain et fantasme incarné, homme et femme, punk et funk, new wave et disco, la Mendoza (son véritable nom de famille) n'a eu de cesse, au fil des années, d'incarner l'ambiguïté. Une ambiguïté assumée et d'ailleurs parfaitement dans l'air du temps. A ce sujet, son talent pour l'incongru, l'étrange et l'inattendu ne fut jamais aussi évident que sur cet Hurricane bien nommé qui balaie tout sur son passage.

Soutenue par une tripotée d'invités de marque, parmi lesquels Tricky, Brian Eno, le batteur de Fela, Tony Allen ou encore Sly Dunbar et Robbie Shakespeare, Hurricane remet les choses à leur place, en effet. A l'écoute de ce nouvel album, on finit par se demander quelle époque de l'histoire de la musique de ces trente dernières années, ne doit pas son tribut à Grace Jones ? Du trip-hop de Massive Attack à l'electroclash et au punk funk du début des années 2000, toutes ou presque paraissent empruntes de la sensualité racée de l'extraordinaire animal. Qu'il s'agisse de l'époque disco (Portfolio en 1976) à la synth pop (Warm Leatherette en 1980, où elle reprend The Normal mais aussi Jacques Higelin), en passant par la new wave (Nightclubbing, 81) ou le dub teinté de punk (Living My Life en 1982), Grace Jones semble avoir déposé sa patte sur tout ce qui fait le son contemporain. De fait, la Jamaïcaine de Spanish Town n'a cessé de faire le grand écart entre culture pop mainstream et underground. Il ne pouvait d'ailleurs en être autrement pour celle qu'Andy Warhol adulait comme une icône "pop moderne".

"I'm an hurricane", clame la diva sur son dernier album éponyme et on veut bien le croire, écrasé que nous sommes par les secousses brutales du ragga electro puissant de "This Is" (qui rappel "My Jamaican Guy" période Compass Point, en mieux !) ou par le sombre "William's Blood" (feat Tricky et magnifiquement mis en image par Chris Cunningham). Atmosphérique, lyrique aussi, sans tomber dans les travers que cultiva parfois la belle à la fin des années 80, Hurricane est indéniablement un excellent album en plus d'être une belle surprise. "Well Well Well", "Devil in My Life" ou le tubesque "Corporate Cannibal", s'inscrivent durablement dans l'inconscient de l'auditeur qui reviendra souvent (et parfois à son grand étonnement) vers ce disque fervent. Vingt ans plus tard, à presque 60 ans et après plus de 40 ans de carrière, Grace Jones reste Grace Jones sans jamais céder un pousse de terrain à la hype. Normal, elle est unique.

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