mercredi 9 juin 2010

Encore les Doors !


Le réalisateur indé Tom DiCillo, qu'on connaît surtout pour son film Ca tourne à Manhattan, s'essaie pour la première fois au documentaire avec When You're Strange, consacré au Doors. Malgré une mise en scène fourre-tout, et une voix off de Johnny Depp qui ne nous apprend pas grand-chose sur le légendaire groupe de rock, la fascination pour Jim Morrison opère toujours.
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Vétéran du cinéma indépendant, Tom DiCillo s'est toujours intéressé au rock et à Hollywood. De Johnny Suede à Ca tourne à Manhattan, en passant par Delirious, il est toujours question chez lui de quête de célébrité et de subversion au sein du star-system. Les Doors constituent donc un parfait sujet pour lui.

When You're Strange n'est pas un biopic - ça, c'est déjà fait par le lourdingue Oliver Stone - mais un documentaire, le premier sur le groupe de Jim Morrison. L'ouverture du film est assez saisissante : un type barbu aux cheveux longs, vêtu d'un t-shirt délavé et d'un pantalon de cuir noir, émerge d'une voiture accidentée, sur la bas-côté d'une highway américaine. On est en plein désert, l'image a la netteté du 35 mm et la fluidité d'un Gus Van Sant. Devenu autostoppeur, le drôle de hippie arrête un véhicule vide, et prend le volant. Ce hippie barbu, c'est Jim Morrison évidemment.

DiCillo dispose en effet d'un matériau inédit pour son film : « HWY- an american Pastoral » est un moyen métrage tourné dans le désert par Paul Ferrara, un ancien camarade de Morrison, de l'époque où il étudiait le cinéma à l'UCLA. Tourné en 1970, un an avant la mort du chanteur des Doors à Paris (que DiCillo évoque par le biais ingénieux d'un commentaire radio off, faisant de l'acteur Morrison un conducteur fantôme), ce film expérimental à l'étrange impact onirique montre Morrison jouer avec des enfants, se rouler torse nu sur des rochers, communier une dernière fois avec la nature avant d'en finir, comme le Blake/Kurt Cobain de Last Days.

Composant le fil rouge de When You're Strange, ces images constituent le principal intérêt du film. DiCillo dispose par ailleurs de nombreux rushes concernant les tournées chaotiques des Doors, ainsi que de témoignages des trois autres membres du groupe. Le réalisateur les accole selon un montage chronologique, très rapide, donnant trop souvent au film des allures de patchwork clipesque et impersonnel. Ascension fulgurante, scandales, drogue, sexe, chute, mort et résurrection par la légende. Les fans des Doors n'apprendront rien devant ce documentaire, d'autant que le texte lu d'une voix monocorde par Johnny Depp s'extirpe rarement du commentaire tautologique sur le talent de poète de Morrison ou le contexte historiquement violent des années 1960 aux Etats-Unis.

Mais les fans comme les novices auront du mal à ne pas succomber une nouvelle fois à la séduction de Jim Morrison. Croiser son regard, mi-étonné, mi-goguenard, suffit. Il crève l'écran, et il le sait. C'est cet aspect-là du personnage, la conscience de la fascination qu'il exerce, mais surtout son addiction à double tranchant pour la célébrité (contrairement aux autres Doors préférant mettre en avant la musique), qui intéresse le plus Tom DiCillo, et qu'on retiendra de When You're Strange.

When You're Strange
De Tom DiCillo

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