jeudi 30 juin 2011

My Little Princess», ma fille ma pagaille



Par BRUNO ICHER
Eva Ionesco revient avec finesse sur son passé d’enfant exhibée à des photographes de charme.


"My Little Princess", avec Isabelle Huppert, Anamaria Vartolomei... - DR
Pour Eva Ionesco, toute la complexité de ce film autobiographique était de trouver une distance susceptible de traduire, sans complaisance ni pudibonderie, le scandale perpétuel qui a accompagné toute son enfance. Eva, fille d’Irina, a séché l’école pour devenir le modèle principal des photos érotiques réalisées par sa mère dans son appartement transformé en cabinet de curiosités. Ces photos, prises à partir des 4 ans de l’enfant, ont alimenté des dizaines de unes de magazine de la fin des années 70, mais aussi les rebondissements d’une bagarre juridique interminable au cours de laquelle la question s’est posée de séparer la mère de sa fille.

Ces images, propriété d’Irina, sont surtout, aujourd’hui encore, une blessure pour la cinéaste. En choisissant de ne pas montrer, justement, la nudité du modèle (Anamaria Vartolomei, dont la beauté surfardée rappelle Brooke Shields dans la Petite de Louis Malle - lire Libé de mardi ), Eva Ionesco n’occulte pourtant rien de la violence des situations : la gamine qui fume de l’opium, les insultes cinglantes («Ta gueule, grosse pute» de la petite à sa mère) ou les séances photo avec les «écarte un peu plus les cuisses» de la photographe à son modèle (Huppert dans une grande performance de tendresse détraquée). Du vécu, donc, mais sur le fil du rasoir de la fiction. Difficile de résumer My Little Princess mieux que Charles Tesson, futur patron de la Semaine de la critique, présentant le long métrage : «Le film a su éviter de devenir le proxénète de son sujet.»

Semaine de la critique My Little Princess d’Eva Ionesco avec Isabelle Huppert, Anamaria Vartolomei… 1 h 45. Sortie le 29 juin.

Alvaro Beamud Cortes photographie Julian Schratter et Leo Vlašić-Klasan